Les comptes de patrimoine:
La CN ne comprend pas seulement les comptes de flux déjà présentés. Depuis les années soixante-dix, elle prévoyait aussi des comptes de stocks, appelés comptes de patrimoine, et des comptes des variations de patrimoine permettant de passer des comptes de patrimoine de l’année n à ceux de n + 1. Après bien des péripéties liées à un manque de moyens, la publication annuelle de tous ces comptes a commencé en 1994. Une lacune considérable a été ainsi comblée, car les théories économiques supposent que de nombreux comportements dépendent de variables patrimoniales, mais celles-ci restaient jusqu’alors difficiles à évaluer.
Le patrimoine d’un agent économique est l’ensemble de ses avoirs et de ses dettes à un moment donné. Le compte de patrimoine d’un SI se présente comme un bilan au 31 décembre. À l’actif, les actifs (avoirs) non financiers (corporels ou non) et financiers (créances). Au passif, les passifs toujours financiers (dettes). Le solde, c’est-à-dire la différence entre les actifs et les passifs, est la valeur du patrimoine. On l’appelle la valeur nette.
Les actifs non financiers qui figurent dans les comptes de patrimoine sont uniquement ceux sur lesquels il est possible d’exercer des droits de propriété, individuellement ou collectivement, et dont la détention procure des avantages économiques à leurs propriétaires (revenus primaires ou produits de leur cession). Sont donc exclus le patrimoine écologique (air, biodiversité…) et le capital humain (puisque l’esclavage a disparu). Le domaine public naturel (rivages maritimes, eaux territoriales…) n’est pas considéré comme un actif économique.en pratique une partie des éléments du patrimoine ne peut pas être évaluée faute de transactions significatives (monuments, œuvres d’art…). Son exclus également des biens qui ne peuvent pas être accumulés puisque les conventions de la CN les rangent dans la consommation finale (automobiles utilisées par les ménages…) ou intermédiaire (biens durables strictement militaires). Toutes ces restrictions conduisent à une notion de patrimoine relativement étroite.
Les éléments patrimoniaux sont évalués aux prix auxquels ils auraient été vendus (s’ils l’avaient été) à la fin de l’année. Cette valeur vénale correspond normalement au coût de remplacement. Ce principe n’a guère de sens pour les biens d’équipement. Pour ces biens, en effet, la vente se fait dans des conditions qui pénalisent les vendeurs (faillites…), ou sur des marchés trop étroits — lorsqu’ils existent — pour que les prix qui y sont pratiqués soient de bons indicateurs de la valeur de remplacement. Comme on veut évaluer les biens dans une perspective de poursuite de l’activité et non de liquidation de l’entreprise, on retient en fait la valeur d’inventaire (méthode de l’inventaire permanent, appelée aussi méthode chronologique qui revient à simuler l’accumulation du capital). On procède de même pour les logements et les bâtiments puisqu’on veut distinguer leur valeur de celle des terrains bâtis (voir note sous le tableau). La valeur des éléments du capital fixe est alors égale à ce qu’ils coûteraient s’ils étaient rachetés neufs à la fin de l’année (capital brut), moins leur dépréciation par suite d’usure normale ou d’obsolescence prévisible (consommation de capital fixe depuis l’achat). La dépréciation est calculée à partir d’études complexes : l’amortissement comptable des entreprises résulte en effet de l’application de règles fiscales alors que l’on veut mesurer une dépréciation économique des paramètres principaux sont les durées de vie moyenne et les profils de dépréciation, lente puis accélérée. Les durées de vie moyennes sont : cinq ans pour le matériel informatique et les logiciels, sept pour les matériels de transport, dix pour ceux de communication, trois ans pour les actifs artistiques, soixante ans pour les infrastructures…
La valeur nette pour l’ensemble des SI, appelée patrimoine national, est la différence entre les actifs (financiers ou non) et les passifs possédés par les résidents. En économie fermée (c’est-à-dire sans relations avec le reste du monde), les dettes des résidents sont nécessaire- j ment des créances pour d’autres résidents. Actifs financiers et passifs s’équilibrant, la valeur du patrimoine national est donc égale à celle des seuls actifs non financiers. En économie ouverte, il faut y ajouter les créances des résidents sur le reste du monde moins les dettes de même nature.
Les différences entre les deux comptes de patrimoine successifs d’un SI résultent des flux économiques de l’année (données du compte de capital et du compte financier) et de variations de la valeur du patrimoine qui ont d’autres causes: consommation de capital fixe (elle diminue la valeur du patrimoine), variations de prix, etc. Tous ces éléments sont présentés dans des comptes de variations de patrimoine qui permettent de passer du patrimoine de clôture d’une année à celui de l’année suivante pour chacun des SI.
Les comptes de patrimoine permettent de calculer de nombreux ratios utiles, surtout si on les relie aux données des comptes de flux. Par exemple, le coefficient de capital cher aux économistes, rapport du capital utilisé à la valeur ajoutée produite pendant l’année. Si on le mesure par le rapport du capital fixe net moyen utilisé pendant l’année n (obtenu par la moyenne des actifs fixes à la fin de n – 1 et de n) au PIB net de l’économie nationale, il est de 3,61 en 2007.
Le tableau montre que le patrimoine national (somme des valeurs nettes des SI) correspond à environ 6,6 fois le PIB. Que ce niveau soit très proche du total des actifs non financiers signifie que les relations financières avec le reste du monde sont assez équilibrées : les créances détenues sur lui par les résidents dépassent leurs dettes à son égard à quelque 22.7 milliards d’euro; la valeur du patrimoine national est très sensible à certaines conventions de valorisation : par exemple, la valorisation des terrains légalement constructibles aux prix des terrains à bâtir (méthode de la base 1980) ou aux prix de la terre agricole (méthode de la base 1971) modifiait le patrimoine national de plus de la moitié du PIB.
lui-même très sensible à certains choix : si le taux d’actualisation utilisé pour le calcul passe de 4 % à 3 %, l’estimation de l’équivalent patrimonial augmente de 50 %. À une époque où le puissant lobby des assureurs ne lésine pas sur les efforts de désinformation, ce genre de résultat n’est pas inintéressant.
produit intérieur brut (PIB)
Comptabilité Nationale(CN)
secteur institutionnels(SI)
formation brute de capital fixe (FBCF)
Les variations de patrimoine:
Quatre facteurs permettent de rendre compte des écarts entre les valeurs du patrimoine à la fin de l’année n et à la fin de l’année n + 7. Ils sont présentés dans des comptes des variations de patrimoine disponibles pour chacun des SI (le tableau en constitue une version simplifiée pour une période plus longue) :
Flux : sous cette appellation sont récapitulées les opérations retracées dans le compte de capital et le compte financier de l’année n : FBCF qui augmente la valeur des actifs fixes reproductibles (machines…), variations de stocks (éventuellement négatives si les entrées en stocks ont été inférieures aux sorties pendant l’année), etc.
– Consommation de capital fixe : c’est une évaluation de la dépréciation des machines, bâtiments et autre capital fixe, subie pendant l’année n par suite d’usure normale ou d’obsolescence prévisible. En 2004, cette CCF correspond à 66 % de la FBCF et à 4,6 % du capital fixe net du début de l’année (les actifs fixes figurant dans les comptes de patrimoine correspondent exactement au capital fixe net). L’investissement net représente donc un tiers de l’investissement total. Ces proportions sont assez différentes selon les branches et les actifs.
-Réévaluation : retrace la modification de valeur des éléments de l’actif ou du passif dix aux modifications de prix au cours de l’année. Évidemment, l’interprétation de ces changements est toujours ambiguë car les prix de marché qui servent à évaluer des stocks peuvent être obtenus à partir de données sur des transactions peu nombreuses.