Economie : Globalisation et inégalités
Pour la théorie économique, la globalisation est synonyme de libéralisation et d’accroissement des échanges de marchandises et de capitaux. Quel lien établir avec les inégalités ? Malgré une littérature immense sur le sujet, on en est resté au type d’analvse initiée par David Ricardo, qui estimait au début du XIXe siècle que le libre-échange était en moyenne une bonne chose pour les revenus des deux pays qui s’y livrent. Dans les années I960, Wolfgang Stolper et Paul Samuelson confirment cette analyse, tout en ajoutant qu’il peut y avoir en même temps accroissement des inégalités dans l’un des deux pays. Prenons l’exemple d’un pays développé qui compte un ratio ingénieurs/ouvriers non qualifiés nettement plus favorable aux premiers que dans un pays émergent. C’est une comparaison que l’on pourrait établir, par exemple, entre l’Europe et la Chine ou l’Inde. S’il y a libre-échange entre les deux, l’Europe va se spécialiser dans les biens qui ont un fort contenu de travail d’ingénieur, la Chine ou l’Inde dans les biens qui ont un fort contenu de travail non qualifié. La demande de travail qualifié en Europe va augmenter : on embauchera de plus en plus d’ingénieurs chez Airbus, mais on licenciera les ouvriers du textile. Les inégalités entre les gens qualifiés et les gens non qualifiés vont de fait augmenter en Europe, mais diminuer en Chine ou en Inde. Un tel modèle est statique. Il est fait d’un avant et d’un après, un nouvel équilibre s’établissant après l’ouverture de frontières que l’on considérait initialement fermées. Globalement, la richesse moyenne des deux régions a augmenté, mais les inégalités se sont aggravées dans l’une et réduites dans l’autre.
Tel est le cœur de la doctrine actuelle. Cependant, très vite, des économistes hétérodoxes ont introduit la dynamique. Frédéric List, vingt ans après Ricardo, a ainsi souligné que plus on produisait, plus les coûts de production diminuaient. C’est ce qu’on appelle le phénomène des rendements croissants. Si l’Angleterre a déjà une puissante industrie sidérurgique et si l’Allemagne veut se lancer dans ce secteur, elle aura initialement des coûts de production plus élevés, et ne sera pas compétitive au plan international. Mais si les Allemands sont en réalité de meilleurs ingénieurs que les Anglais, ils finiront par les battre, à condition qu’on leur laisse le temps de développer leur industrie sidérurgique. En prenant en compte la dynamique économique, avec des rendements croissants, on peut justifier la protection des « industries naissantes ». Dans les faits, cependant, le protectionnisme a été catastrophique dans certains pays. À partir des années 1930, il a clairement entravé la croissance et le rattrapage des pays dAmérique latine. Dans d’autres cas, il a été extrêmement favorable. Que l’on songe au Japon, mais aussi bien aux Etats-Unis, qui ont rattrapé la Grande- Bretagne au moyen de politiques extrêmement protectionnistes – avec 50 % de droits de douane sur les marchandises à la fin du xixe siècle, à une époque dite de libre-échange.
Une nouvelle fois, il s’agit d’une théorie trop partielle et qui n’est pas solidement fondée. Mais il est vrai que dès que l’on prend en compte des imperfections de marché, on peut faire dire aux modèles presque n’importe quoi sur les avantages du libre-échange et ses effets sur les inégalités. La réalité empirique présente de plus des exemples tout à fait contrastés.
Vidéo : Economie : Globalisation et inégalités
Vidéo démonstrative pour tout savoir sur : Economie : Globalisation et inégalités
https://youtube.com/watch?v=HBuiOIRioTk%C2%A0